Interview de Sophie Favier par Parent-Solo, pour Parole de Mamans
Le magazine Parole de Mamans a sollicité Nathalie Guellier, co-créatrice du site parent-solo.fr pour devenir " maman rédactrice ", le temps d'une interview de Sophie Favier.
" Ma fille est sortie renforcée de la séparation de ses parents "
Sophie Favier, maman d'une fille de 11 ans, livre à Nathalie, mère d'un garçon de 11 ans, sa vision de la monoparentalité. Échanges d'expériences entre deux " mamans solo ".
Parent-Solo : Est-ce que ta fille était encore bébé lorsqu'on son père et toi vous êtes séparés?
Elle avait un an à peine, pour elle, ça n'a pas été trop perturbant. Elle n'a pas eu le loisir d'appréhender la situation, de voir des gestes tendres…De plus, la séparation n'a pas été conflictuelle. Son père et moi étions en âge d'avoir des enfants, nous avons en avons fait un beau. C'était une vraie histoire d'amour qui n'a duré que 4 ans. Nous avons toujours agi dans l'intérêt de notre fille. On avait la maturité nécessaire pour ne pas faire subir à notre enfant les problèmes du couple.
P.S. : Et que ressent ta fille par rapport à cela ? Penses tu qu'elle souffre de cette situation ? Qu'elle aimerait vous revoir ensemble ?
Je n'ai pas le sentiment qu'elle souffre de cette situation. Elle a du bon des deux côtés. Elle a une vie très différente entre son papa à Marseille, et moi à Paris. Lui est un intellectuel très calme, qui aime jouer au golf, alors que je suis une artiste un peu " brouillon " et fêtarde. Au final, elle trouve dans cette situation un certain équilibre.
P.S. : Penses-tu qu'une séparation, quand elle se passe bien, peut procurer aux enfants une certaine longueur d'avance ?
Notre séparation a effectivement donné à ma fille de la maturité et de la force par rapport aux autres enfants, parfois surprotégés dans un cocon familial. Elle s'est construite de manière plus individuelle.
P.S. : Et avoir un papa si loin, ce n'est pas une contrainte ?
Non c'est assez équilibré, il l'appelle le matin et le soir et la voit pendant les vacances. Il y a la webcam, le courrier, le téléphone. Je ne suis pas certaine que les papas vivant sous le même toit que leurs enfants prennent le temps de leur parler 10 minutes par jour. Finalement on s'adapte bien à cette situation.
P.S. : Et tu n'as jamais culpabilisé par rapport à son père ?
Non, tout s'est très bien passé. Mes obligations professionnelles à Paris, et celles de son père à Marseille nous ont contraints à faire un choix. Un enfant, durant ses premières années, a besoin de sa mère. Mais c'est aussi à l'enfant de choisir. Si ma fille voulait vivre chez son père, je ne pourrais pas m'y opposer.
P.S. : Est-ce que cela pourrait se produire ?
Parfois, le quotidien est dur à gérer. Son père, qui l'a pendant les vacances, a surtout les avantages. Mais c'est sa vie à elle. Si elle désire partir un jour, elle le fera. Un enfant n'est pas notre propriété, il n'est pas là pour combler un vide affectif.
P.S. : Est-ce que cette séparation t'a fait envisager la vie autrement ?
Cela dépend évidemment de la séparation. Pour moi, elle s'est bien passée. Je n'ai donc pas de raison d'en vouloir à la vie ou au destin. On peut réussir sa séparation. Il ne faut pas se leurrer : quand ça ne va plus ça ne va plus. Il y a des gens qui adoptent la politique de l'autruche, qui attendent que les enfants grandissent. En réalité, chacun a son rythme.
P.S. : As-tu une relation fusionnelle avec ta fille ?
Oui. On parle énormément, je fais beaucoup de choses avec elle, mais je ne l'étouffe pas et je ne suis pas sa copine pour autant.
P.S. : Est-ce que cela a été compliqué de préserver ta vie de femme ?
Oui un peu. Je suis stricte là-dessus. Aucun homme ne vient à la maison. Je ne veux pas compliquer les choses. Il faut que cela soit très sérieux pour que je les présente l'un à l'autre. J'ai eu deux grandes histoires, je m'efforçais de les vivre à l'extérieur de mon foyer, de façon à ne pas perturber ma fille. Jusqu'au jour où j'ai entamé une relation de couple sérieuse et là j'ai présenté ma fille à un homme. C'est un peu compliqué mais dans la mesure où il y a des projets de construction d'une vie de couple, voire l'envie de faire un autre enfant, il ne faut pas mettre l'enfant à l'écart même si cela occasionne des frictions. Il faut expliquer aux enfants que les parents ont le droit d'être heureux, d'avoir une vie équilibrée, et que cela peut impliquer d'avoir une nouvelle compagne ou un nouveau compagnon.
P.S. : Est-ce que ta fille est fière d'avoir une maman connue ?
Elle est fière de sa maman oui, mais pas parce que je suis connue. On n'en parle jamais. Elle sait ce que je fais, il y a les avantages et les inconvénients, mais c'est pareil dans tous les métiers. Elle s'en fiche complètement. Et de plus, c'est elle qui est beaucoup plus connue que moi ! Là où nous habitons par exemple, elle est déléguée, elle est très aimée de ses amis, etc.
P.S. : Selon toi y a-t-il un âge où la séparation est moins difficile ?
Je pense que c'est plus facile quand l'enfant est petit. Il n'y a pas de souvenirs, il n'y a pas de souffrance, parce qu'il n'y a pas d'appartenance réelle. Elle n'est que fictive et fantasmagorique. Plus âgés, les enfants sont dans la réflexion : ils sont capables de juger, ils peuvent alors en vouloir aux parents, tomber dans le désamour ou au contraire dans un amour beaucoup trop fusionnel.
P.S. : Si le père habitait en région Paris, une garde en résidence alternée pourrait-elle être envisageable ?
Je ne sais pas si c'est la bonne solution. Il faut vraiment être dans la même ville, dans le même quartier, pour que cela fonctionne.
P.S. : Quels conseils donnerais-tu à une jeune maman en train de se séparer ?
Quand l'un des deux conjoints est plus heureux que l'autre, c'est un peu compliqué pour celui qui reste seul. En ce qui concerne les enfants, je pense qu'il faut toujours établir le dialogue, il ne faut pas leur faire subir le deuil d'une relation. Sans dédramatiser non plus, il faut savoir, sans tricher, être à l'écoute de l'enfant, et faire très attention à eux.
A lire aussi dans le magazine Parole de Mamans de février 2007.
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