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Enlèvement d'enfants : l'Allemagne et l'Autriche tenues de respecter le droit international

Jusqu'alors, l’Allemagne et l’Autriche ne s’estimaient pas tenues de respecter le droit international lié aux enlèvements internationaux d'enfants, dès lors qu’il s’agissait de protéger leurs ressortissants au détriment d’autres citoyens européens.

Pour les juges allemands et autrichiens, "l’intérêt supérieur de l’enfant" implique qu’il vive en Allemagne ou en Autriche avec son parent allemand ou autrichien, même s’il a été enlevé à son autre parent. Un véritable déni de droit...

Pourtant, le droit international est clair : une convention internationale signée à La Haye le 25 octobre 1980 "sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants" — et ratifiée par l’ensemble des pays de l’Union européenne, y compris Berlin et Vienne – prévoit un retour automatique et immédiat de l’enfant enlevé dans son pays de résidence habituelle.

Mais, il existe plusieurs possibilités pour le juge de ne pas ordonner ce retour et notamment "s’il existe un risque grave que le retour de l’enfant ne l’expose à un danger physique ou psychique, ou de toute autre manière ne le place dans une situation intolérable". Une exception que les juges allemands et autrichiens ont interprétée de la façon la plus extensive possible, si bien qu’un enfant enlevé vers l’un de ces deux pays germaniques ne reviendra jamais dans son pays d’origine.

Faute de justice internationale, il est impossible de s’opposer à cette interprétation de la Convention de La Haye qui revient, en fait, à la vider de son sens. Aucun autre pays en Europe ne l’applique ainsi : le retour automatique est la règle.

Mais, avec le traité d’Amsterdam de 1997, l’Union a acquis des compétences dans le domaine judiciaire. Et, le 27 novembre 2003, un règlement communautaire relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions judiciaires en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale a été adopté. Il prévoit notamment la reconnaissance automatique des décisions judiciaires en matière de garde d’enfants rendues par le tribunal compétent, en l’occurrence celui du domicile habituel de l’enfant avant son enlèvement. L’Allemagne et l’Autriche pensaient cependant avoir bien verrouillé leur affaire, puisque le règlement prévoit explicitement que la convention de La Haye de 1980 continue à s’appliquer. Mais voilà : à la différence de cette convention, l’interprétation du règlement communautaire (et donc la convention de La Haye) relève d’un tribunal suprême dont les arrêts s’imposent à l’ensemble des juridictions européennes, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

L’arrêt que la Cour de justice de l’Union européenne a rendu le 1er juillet 2010, achève de réduire à néant soixante ans de jurisprudence allemande et autrichienne. La CJUE rappelle, en particulier, que le règlement de 2003 a une autorité supérieure à celle de la Convention de La Haye dans les rapports entre les États membres et que le tribunal compétent pour statuer en matière de garde et de droit de visite reste le tribunal du lieu de résidence habituelle de l’enfant avant son enlèvement.

Encore une fois, le droit communautaire fait la preuve de sa supériorité sur le droit international. Car toutes les médiations diplomatiques, toutes les conventions internationales ont échoué à convaincre les juges allemands et autrichiens d’abandonner leur jurisprudence. Cette fois, ils n’ont plus le choix. Ce sera autant de drames familiaux douloureux en moins.

(Source : Libération 09 juillet 2010)

Publié le 12/07/2010

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